Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/143

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gnards, qui éclateraient en notre présence ; mais nous les fîmes marcher en se tenant par la main jusqu’à la place, nous-même étant à leur tête, et nous les forçâmes de boire amicalement entre eux à l’extinction des haines et à la perpétuité de l’amitié. Le vieux John Anderson était prévôt cette année-là… le bonhomme en pleura de joie, et les baillis et conseillers en dansaient d’allégresse et de triomphe, tête nue en notre présence, comme de jeunes poulains. — Ce fut en effet un heureux jour, dit lord Huntinglen, et qui ne sera pas oublié dans l’histoire du règne de Votre Majesté. — Je ne voudrais pas qu’il le fût, milord, répondit le monarque ; je ne voudrais pas qu’il fût omis dans nos annales. Oui, oui, beati pacifici… Mes sujets anglais ont raison de se réjouir de m’avoir, car je voudrais qu’il sussent que je suis le seul homme pacifique qui soit jamais sorti de la famille. Si Jacques à la Face-de-Feu fût venu au milieu de vous, dit-il en regardant autour de lui, ou mon bisaïeul de Flodden-Field… — Nous l’aurions renvoyé dans le nord, » dit à voix basse un seigneur anglais.

« Au moins, » dit un autre du même ton et de manière à ne pouvoir être entendu, « nous aurions eu un homme pour souverain, quoique ce n’eût été qu’un Écossais.

« Et maintenant, jeune cadet, » dit le roi à lord Glenvarloch, « où avez-vous passé votre jeunesse ? — À Leyde, en dernier lieu, sous le bon plaisir de Votre Majesté, répondit lord Nigel. — Ah, ah ! un savant ! dit le roi, et sur mon honneur un jeune homme modeste et ingénu qui n’a pas oublié comment on rougit comme la plupart de nos jeunes voyageurs ! Nous le traiterons en conséquence. »

Alors se redressant et toussant légèrement pour s’éclaircir la voix, le savant monarque, après avoir regardé autour de lui, avec l’air d’importance que donne le sentiment d’une profonde supériorité, tandis que tous les courtisans, qu’ils entendissent ou n’entendissent pas le latin, se pressaient avidement pour l’écouter, continua ainsi ses questions :

« Hem ! hem ! Salve, bis quaterque salve, Glenvarlochides noster[1]. Nuperumne ab Lugduno-Batavorum Britanniam rediisti[2] ?

« Le jeune homme répondit en s’inclinant fort bas :

  1. Calf-time, dit le texte ; le temps de votre vêlage, le temps où vous n’étiez qu’un veau. a. m.
  2. Salut, deux et quatre fois salut, notre cher Glenvarloch : y a-t-il long-temps que vous êtes revenu de Leyde en Angleterre ? a. m.