tie de la nuit à continuer une expérience de haute importance, et ses compagnons se retirèrent chacun dans leur chambre à coucher.
CHAPITRE XXIII.
L’ÉVASION.
Cette soirée d’été venait de finir lorsque Jeannette, au moment où son absence plus long-temps prolongée eut pu donner lieu à des soupçons et à des recherches de la part des ombrageux habitants de la maison, revint à Cumnor-Place, et rentra à la hâte dans l’appartement où elle avait laissé sa maîtresse. Elle la trouva les coudes appuyés sur une table et la tête entre ses mains. À l’approche de Jeannette, elle ne leva pas les yeux, et ne fit aucun mouvement.
La fidèle suivante courut vers sa maîtresse avec la rapidité de l’éclair ; et la touchant de la main pour la tirer de son immobilité, elle la conjura de la manière la plus pressante de la regarder et de lui dire ce qui l’affectait à ce point. La malheureuse comtesse leva aussitôt la tête ; et montrant à sa suivante un œil hagard et un visage aussi pâle que la mort : « Jeannette, dit-elle, je l’ai bu.
« Dieu soit loué ! » dit Jeannette avec vivacité ; « je veux dire, Dieu soit loué de ce qu’il n’est pas arrivé pis ! la potion ne vous fera pas de mal. Levez-vous, secouez cette léthargie dont sont atteints vos membres, et ce désespoir qui accable votre esprit.
— Jeannette, répéta la comtesse, ne me trouble point ; laisse-moi en paix ; laisse-moi mourir tranquillement… Je suis empoisonnée.
— Vous ne l’êtes point, ma chère maîtresse, « répondit la jeune fille avec chaleur. « Ce que vous avez bu ne peut pas vous faire de