Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/283

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c’est pour moi-même, c’est pour ce malheureux. Ceux qui sont déshonorés devant les hommes, ceux qui sont condamnés par Dieu, ceux-là ont sujet de s’affliger ; non pas ceux qui sont innocents ! Adieu, madame, » dit-elle en prenant à la hâte le manteau avec lequel elle avait coutume de sortir.

« Vous me laissez, Jeannette ? dit sa maîtresse ; vous m’abandonnez au milieu de cette pénible situation !

— Moi vous abandonner, madame ! » s’écria Jeannette en revenant de toute sa vitesse auprès de sa maîtresse, et couvrant sa main de baisers, « vous abandonner ! Puisse l’espoir de ma foi m’abandonner quand je vous quitterai. Non, madame ; vous avez dit avec raison que le Dieu que vous servez vous ouvrira un chemin à la délivrance : il y a un moyen de salut ; j’avais invoqué nuit et jour la lumière du ciel afin d’apprendre comment accorder ce que je dois à ce malheureux homme, et ce que je vous dois. Cette lumière a brûlé à mes yeux d’une manière tout effrayante, et je ne dois pas fermer la porte du salut que Dieu m’a ouverte. Ne m’en demandez pas davantage ; je reviendrai dans un instant. »

En disant ces mots elle s’enveloppa dans son manteau, et, après avoir dit à la vieille qu’elle rencontra dans l’antichambre qu’elle allait à la prière du soir, elle sortit de la maison.

Cependant son père avait regagné le laboratoire, où il trouva les complices du crime qu’il avait essayé de commettre.

« L’aimable oiseau a-t-il bu ? » dit Varney avec un demi-sourire, tandis que l’astrologue faisait la même question des yeux, mais sans proférer une parole.

« Non, et ce n’est pas moi qui me chargerai de la faire boire ; voudriez-vous que je commisse un meurtre en présence de ma fille ?

— Ne t’a-t-on pas dit, lâche coquin, « répondit Varney avec amertume, « que ce n’est point d’un meurtre, comme tu le dis avec ce regard effaré et cette voix tremblotante, qu’il s’agit en cette affaire ? Ne t’a-t-on pas dit qu’une courte indisposition, comme les femmes savent en feindre au besoin, afin de pouvoir garder leur habillement de nuit pendant le jour, et rester sur le lit de repos au lieu de s’occuper des affaires du ménage, était tout ce dont il s’agissait ? Voici un savant qui te le jurera par la clef du château de la sagesse.

— Je jure, dit Alasco, que l’élixir contenu dans ce flacon ne peut d’aucune manière porter préjudice à la vie. Je le jure par cette