Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/126

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— Un moment vous-même, répliqua Dickie ; pensez plutôt à ce que vous répondrez à maman pour m’avoir envoyé ainsi au diable. «

Le magister, frappé de la responsabilité qui allait peser sur lui, s’élança en grande hâte pour saisir le petit bonhomme et l’empêcher de partir ; mais Dickie lui échappa des mains, sauta hors de la chaumière et courut se réfugier au haut d’un tertre voisin, tandis que le précepteur, qui savait par expérience qu’il ne pourrait pas rattraper son disciple à la course, avait recours aux épithètes les plus doucereuses que pouvait lui fournir la langue latine, pour lui persuader de revenir. Mais aux mots de mi anime, corculum meum[1], et à tous les compliments classiques de son maître, le marmot fit la sourde oreille, et il continua à sautiller sur la hauteur, comme un lutin au clair de la lune, en faisant signe de le suivre à sa nouvelle connaissance.

Tressilian se hâta de faire sortir son cheval, et partit pour rejoindre son malin guide, après avoir presque forcé le précepteur abandonné à accepter une récompense pour l’accueil qu’il lui avait fait, ce qui calma en partie la frayeur que lui causait la perspective du retour de la vieille. Il paraît qu’il ne tarda pas, car, avant que Tressilian et son guide fussent à une grande distance, ils entendirent les cris aigus d’une voix de femme, mêlés des réprimandes classiques de maître Erasmus Holyday. Mais Dickie Sludge, également sourd à la voix de la tendresse maternelle et de l’autorité magistrale, n’en courait pas moins tranquillement devant Tressilian ; il observait seulement que s’ils criaient jusqu’à s’enrouer, ils pourraient lécher le pot au miel, car la veille même il avait mangé tout ce qui était dedans.

  1. Mon âme, mon petit cœur. a. m.