Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/453

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et je ne suis pas de beaucoup de mois plus vieux que lorsque je quittai le château, mais j’ai acquis assez de bon sens pont ne pas tourmenter un homme qui a de l’expérience dans sa profession.

— Alors je ne voudrais pas troquer ma place contre celle de fauconnier du roi, dit Adam Woodcock, ni contre celle de fauconnier de la reine. Mais on dit qu’elle sera cloîtrée et n’en aura jamais besoin… Je vois que cela vous chagrine d’y penser, et je me chagrinerais de compagnie : mais que faire ! la Fortune prend son vol sans jamais pouvoir être arrêtée, et un homme s’enrouerait à la rappeler sans en pouvoir venir à bout. »

L’abbé et Roland se mirent en route pour Avenel, où le premier fut reçu affectueusement par son frère, tandis que la dame du château pleurait de joie de voir que l’orphelin qu’elle avait protégé avec tant de soin était le dernier rejeton de sa propre famille. Sir Halbert Glendinning et toute sa maison furent un peu surpris du changement qu’une si courte connaissance du monde avait produit sur leur ancien hôte. Ils se réjouirent de voir que le page gâté, impertinent et présomptueux, était devenu un jeune homme modeste et raisonnable, qui connaissait trop ses propres espérances pour demander avec chaleur et pétulance ce qui lui était promptement et volontairement accordé. Le vieux majordome Wingate fut le premier à chanter ses louanges, et mistress Lilias lui servit enfin d’écho, espérant que Dieu ferait un jour connaître à l’ex-page son véritable Évangile.

En effet le cœur de Roland avait toujours été porté secrètement vers ce véritable évangile, c’est-à-dire vers la réformation ; et le bon abbé étant parti pour la France dans le but d’accomplir la résolution qu’il avait prise d’entrer dans quelque maison de son ordre en ce royaume, ce départ leva toutes les difficultés qu’il aurait pu apporter. Ce qu’il devait à Madeleine Græme aurait encore pu ajouter quelque obstacle au changement de croyance de son jeune ami. Mais il apprit, avant d’avoir été long-temps au château d’Avenel, que sa grand’mère était morte à Cologne, en remplissant une pénitence trop rigoureuse pour son âge, qu’elle s’était imposée par amour pour l’Église et la reine d’Écosse, aussitôt après qu’elle eut appris la perte de la bataille de Langside. Le zèle de l’abbé Ambroise fut plus sage ; il se retira dans un couvent écossais à… et il y vécut de telle sorte, que la confrérie fut portée à demander pour lui les honneurs de la canonisation. Mais il devina ce projet, et pria les moines, sur son lit de mort, de ne rendre