Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/442

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qui venait de mettre un second adversaire hors de combat, et qui se hâtait de prévenir les efforts de Glendinning pour recommencer la lutte.

« Je ne puis faire autrement que de me rendre, dit sir Halbert, puisque les forces me manquent pour combattre, mais je rougis de honte de dire à un lâche comme toi : Je me rends.

— Ne me nomme pas lâche, » dit Roland levant sa visière, et aidant son prisonnier à se relever, « sans tes anciennes attentions pour moi, et surtout sans les bontés de ta noble dame, tu aurais rencontré dans moi un autre brave.

— Le page favori de ma femme, » dit sir Halbert avec étonnement ; « ah ! malheureux enfant, j’ai appris ta trahison à Lochleven.

— Ne la lui reproche point, mon frère, dit l’abbé, il ne fut que l’agent de Dieu.

— À cheval, à cheval ! s’écria Catherine Seyton ; montez vite, allez-vous-en, ou nous sommes tous perdus. Je vois nos braves soldats fuyant sur un espace de plus d’une lieue. À cheval, seigneur abbé ; à cheval, Roland ; à cheval, chère princesse ; nous devrions déjà être à plus d’un mille d’ici.

— Regardez ces traits, » dit Marie lui montrant le chevalier prêt à rendre le dernier soupir, et dont une main compatissante avait détaché le casque ; « regardez-le bien, et dites-moi si celle qui cause la mort ou la ruine de quiconque l’a aimée, doit elle-même faire un pas de plus pour sauver sa misérable vie ? »

Depuis long-temps le lecteur doit avoir deviné ce que la reine avait elle-même découvert avant que ses yeux le lui confirmassent. Cette figure était celle de l’infortuné George Douglas, sur laquelle la mort avait imprimé son triste sceau.

« Regardez-le bien, regardez-le encore, dit la reine ; voilà ce qui fut réservé à tous ceux qui ont aimé Marie Stuart ! La royauté de François, l’esprit de Chastelar, le pouvoir et la courtoisie de l’aimable Gordon, le mélodieux talent de Rizzio, la noble taille et la grâce du jeune Darnley, l’audacieuse fierté, les manières galantes de Bothwell, et aujourd’hui l’amour profond et si dévoué du noble Douglas, rien n’a pu sauver aucun d’eux : leurs yeux et leurs cœurs se sont tournés vers l’infortunée Marie ; ils l’ont aimée, et leur amour fut un crime digne d’une mort prématurée. Aussitôt qu’une de ces tristes victimes avait conçu dans son âme une douce pensée en ma faveur, la coupe empoisonnée, la hache et le billot, le poignard, les mines, les cachots étaient là tout prêts pour la