Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/419

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des seins pleins d’honneur. Voici des bannières que le vent agite, légères comme les nuages d’été… Grand Dieu ! quel plaisir éprouvent mes yeux fatigués en relisant ces devises !… Voici celle de ton brave père… celle du superbe Hamilton… celle du fidèle Fleming… Regarde ! regarde ! ils m’ont aperçue, et se pressent vers cette fenêtre. »

Elle ouvrit la croisée ; et la tête nue, ses superbes cheveux tombant en désordre, et son beau bras légèrement recouvert de son manteau, elle répondit par un geste et des signes de tête aux cris de joie des guerriers, que l’écho répétait à plusieurs milles à la ronde. Lorsque le premier élan de son ivresse fut passé, elle se rappela qu’elle était à peine vêtue, et, mettant ses mains sur son visage, qui se couvrit de rougeur, elle se retira précipitamment de la fenêtre. On devina aisément la cause de sa retraite : ce qui augmenta l’enthousiasme général pour une princesse qui, dans son empressement à reconnaître le service que ses sujets venaient de lui rendre, avait oublié la dignité de son rang. Les attraits sans parure de cette femme charmante touchèrent plus les spectateurs guerriers que n’auraient fait les pompeux ornements de ses habits royaux : et ce qui aurait semblé trop libre dans sa manière de se présenter à leurs yeux fut plus qu’excusé par l’enthousiasme du moment, et par la délicatesse que fit voir sa retraite précipitée. À peine les acclamations étaient-elles éteintes, qu’elles se renouvelaient aussitôt, et leurs sous se perdaient encore dans les bois et dans les montagnes. Dans cette nuit, beaucoup jurèrent sur la croix de leurs épées, que la main ne se dessaisirait pas de son arme que Marie Stuart ne fût rétablie dans ses droits. Mais que sont les promesses, que sont les espérances des mortels ? Dix jours après, ces braves et fidèles guerriers étaient morts, ou captifs, ou en fuite.

Marie se laissa tomber sur le siège qui était le plus près d’elle, et, encore rouge de pudeur et le sourire sur les lèvres, elle s’écria : « Ma mignonne, que penseront-ils de moi… m’être montrée ainsi les pieds nus, ayant mis à la hâte mes pantoufles… couverte de ce manteau… mes cheveux tombant sur mes épaules, et mes bras et mon cou nus ?… Oh ! ce qu’ils peuvent penser de mieux est que ce long séjour dans un donjon a tourné la tête de leur reine. Au fait, mes sujets rebelles ont bien vu le désordre de ma toilette quand j’étais dans la plus profonde affliction : pourquoi garderais-je une plus froide cérémonie avec ces gens fidèles et