Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/392

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pas priver les autres des secours de la religion que leur conscience réclame.

— Madame, le comte de Murray fut, il est vrai, assez faible, pour accorder tout à vos malheureux préjugés ; et un ecclésiastique envoyé du pape se présenta de sa part dans notre ville de Kinross ; mais Douglas est maître de son château, et ne permettra pas que ses foyers soient un instant souillés par un émissaire appartenant à l’évêque de Rome.

— Il me semble qu’il vaudrait mieux, dit Marie, que le prétendu régent m’envoyât dans un endroit où il y aurait moins de scrupules et plus de charité.

— En ceci, madame, vous vous méprenez sur la nature de la charité et de la religion : la charité donne à ceux qui sont dans le délire les médicaments qui conviennent à leur santé, mais leur refuse ces liqueurs qui flattent le palais et augmentent la maladie.

— Ce que vous nommez votre charité, lady Lochleven, est une pure cruauté sous le déguisement hypocrite de soins affectueux. Je suis opprimée parmi vous, comme si vous vouliez en même temps et la perte de mon corps et celle de mon âme ; mais le ciel ne permettra pas toujours une telle iniquité, et ceux qui en sont les agents les plus actifs peuvent s’attendre à recevoir bientôt leur récompense. »

« En ce moment, Randal entra dans l’appartement avec un regard si troublé, que lady Fleming poussa un cri ; la reine tressaillit involontairement, et lady Lochleven, trop fière et trop orgueilleuse pour donner des signes de crainte, demanda promptement ce que c’était.

« Dryfesdale a été tué, madame, » telle fut sa réponse ; « il a été assassiné par le jeune maître Henri Seyton aussitôt qu’il eût atteint la terre ferme. »

Ce fut alors le tour de Catherine de tressaillir et de devenir pâle. « Le meurtrier du vassal de Douglas s’est-il échappé ? » fut la demande précipitée de lady Lochleven.

« Il n’y avait personne pour le défier que le vieux Keltie, et le voiturier Auchtermuchty, répliqua Randal ; de semblables hommes ne pouvaient tuer un des plus fringants jeunes gens de toute l’Écosse, et qui était certain d’avoir des amis et des partisans à fort peu de distance.

— Le crime a-t-il été complet ?