Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/347

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— Non, vassal ! reprit la dame avec indignation ; ma vengeance ne s’abaisse pas à des moyens aussi vils. Il me faut une réparation plus digne, ou la tombe de mes ancêtres couvrira ma honte.

— Et vous l’aurez, madame, reprit Dryfesdale ; avant que deux soleils aient passé sur votre injure, vous pourrez vous dire amplement vengée. »

La dame ne fit pas de réponse : peut-être n’entendit-elle pas ces paroles, parce qu’elle sortait de l’appartement. Par l’ordre de Dryfesdale, tous les serviteurs se retirèrent ; les uns pour faire la garde, les autres pour se reposer. L’intendant resta quand ils furent partis ; et Roland Græme, qui était seul dans l’appartement, fut tout surpris de voir le vieux soldat avancer vers lui avec un air plus cordial que de coutume, mais qui convenait mal à ses traits rechignés.

« Jeune homme, dit-il, je t’ai fait quelque tort, et c’est ta faute ; car ta conduite m’a paru aussi légère que la plume que tu portes sur ton chapeau ; et certes, ton habit fantasque et ta gaieté folle pouvaient motiver un jugement sévère. Mais j’ai vu cette nuit par ma croisée, tandis que je regardais comment tu t’étais arrangé dans le jardin, j’ai vu, dis-je, les efforts véritables que tu as faits pour retenir le compagnon du perfide qui s’est rendu indigne du nom de son père, et qui doit être retranché de l’arbre de sa maison comme une branche pourrie. J’étais prêt à venir à ton secours quand le pistolet partit ; et le garde, fourbe que je soupconne avoir été gagné tout exprès, s’est vu contraint de donner l’alarme, ce qu’il était de son devoir de faire plus tôt. Aussi, pour expier mon injustice envers toi, je suis prêt à te rendre un service, si tu veux le recevoir de moi.

— D’abord, puis-je vous demander de quoi il s’agit ? reprit le page.

— Simplement de porter la nouvelle de cette découverte à Holy-Rood, ce qui peut te mettre en faveur aussi bien auprès du comte de Morton et du régent lui-même, que de sir William Douglas, attendu que tu as vu l’affaire d’un bout à l’autre, et que tu as rempli fidèlement ta tâche. Ta fortune sera dans tes mains, et j’espère que tu renonceras à tes folles vanités, et que tu marcheras en ce monde comme un homme qui pense qu’il y en a un autre.

— Sir intendant, reprit Roland Græme, je vous remercie de votre bon service ; mais je ne puis remplir votre commission, non pas précisément parce qu’étant serviteur de la reine je ne puis rien faire contre elle, mais parce qu’il me semble, mettant cette