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Mais comme Roland, encouragé peut-être par ce rire étouffé, pensa que l’offense n’était pas impardonnable, et continuait à retenir l’inconnu par le pan de son manteau, celui-ci s’écria, du ton le plus sévère : « Insensé, laissez-moi partir ; il s’agit dans ce moment de vie ou de mort. Je ne voudrais pas te faire de mal, mais gare à toi ! »

En parlant ainsi, il fit un effort soudain pour s’échapper ; mais, dans ce moment, un pistolet, qu’il portait dans sa main ou sur sa personne, partit.

Ce son guerrier éveilla aussitôt tout le château. Le garde donna du cor et se mit à sonner la cloche du beffroi, en criant de toutes ses forces : « Trahison ! trahison ! Aux armes ! aux armes ! »

La personne que le page avait lâchée au premier mouvement de surprise, disparut dans l’obscurité ; mais le bruit des rames se fît entendre, et, après une ou deux secondes, on déchargea cinq ou six arquebuses et un fauconneau des batteries du château ; on paraissait viser quelque objet sur l’eau. Confondu de tous ces incidents, Roland ne trouva d’autre moyen de protéger Catherine (la croyant dans le bateau qui quittait le rivage), que de recourir à George de Douglas. Il se hâta de se rendre à l’appartement de la reine, où il entendit parler très-haut, et le bruit des pas de plusieurs personnes. Lorsqu’il entra, il se trouva réuni à un groupe de personnes qui, assemblées dans cet appartement, se regardaient attentivement et d’un air étonné. Au fond de la chambre était la reine équipée comme pour un voyage, et suivie non seulement de lady Fleming, mais de l’omniprésente Catherine Seyton, vêtue des habits de son sexe, et portant en main la cassette dans laquelle Marie serrait les joyaux qu’on lui avait permis de conserver. À l’autre bout, près de la porte, était la dame de Lochleven, habillée à la hâte comme une personne éveillée par une alarme subite ; elle était entourée de domestiques, les uns portant des torches, d’autres des sabres nus, des pertuisanes, des pistolets, ou toute autre arme qu’ils avaient pu rencontrer dans le désordre d’une alerte nocturne. Entre ces deux parties du groupe était George de Douglas, les bras croisés sur sa poitrine, les yeux fixés vers la terre comme un criminel qui ne sait comment nier, et néanmoins ne veut pas avouer le crime dans le quel on vient de le surprendre.

« Parle, George de Douglas, s’écria la dame de Lochleven, parle et éclaircis l’horrible soupçon qui pèse sur ton nom ; dis : Un