Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/301

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leté et la sorcellerie de la mère Nicneven, en plaçant sa confiance en Dieu, il lui mettrait la main sur le collet sans crainte : mais cette mère Nicneven n’était pas une sorcière ordinaire, comme Jeanne Jopp qui vivait dans Brierie-Baulk ; elle avait des lords et des lairds qui combattraient pour elle : Moncrieff de Tipermalloch, qui était papiste, et le laird de Carslogie, un partisan avoué de la reine, étaient à la foire, avec il ne savait combien d’épées et de boucliers, et ils feraient sûrement du tumulte si les officiers saisissaient la vieille sorcière papiste qui était leur amie, surtout que les meilleurs hommes d’armes du laird étaient ou dans le château, ou à Édimbourg avec lui, et il doutait que Son Honneur le docteur trouvât des soutiens si les épées étaient dégainées.

Le docteur acquiesça malgré lui à ce conseil prudent : il fut seulement consolé par la promesse que lui fit son satellite que la vieille femme serait, comme il le disait, saisie certainement la première fois qu’elle passerait les limites de la baronnie.

« Et en ce cas, dit le docteur à son garde, le feu et les fagots célébreront sa bienvenue. »

Ces paroles furent entendues par la femme qui passait alors près de lui ; elle lui lança de dessous ses sourcils gris un regard où se peignait la supériorité la plus insultante et la plus méprisante.

« Par ce chemin, dit le médecin ; par ce chemin, » répéta-t-il en introduisant son hôte dans son logis ; « prenez garde de vous heurter contre une cornue, car il est dangereux pour l’ignorant de marcher dans la route des arts. »

Le page trouva matière à précaution ; car, outre les oiseaux empaillés et les lézards, des serpents en bocaux, des paquets de simples suspendus à des cordons, d’autres étendus pour sécher, et toute la confusion, sans parler d’odeurs contraires et nauséabondes, que l’on rencontre dans une boutique de droguiste, il avait encore à éviter des monceaux de charbon de terre, des creusets, des matras, des fourneaux et tous les autres ustensiles d’un laboratoire de chimie.

Parmi ses autres qualités philosophiques, le docteur Lundin possédait une dégoûtante malpropreté, et sa vieille dame de ménage dont la vie, disait-il, était employée à l’arranger, était allée courir, comme les autres, pour se divertir avec la jeunesse. Aussi, bon nombre de bouteilles, de jarres, de fioles, furent-elles heurtées avant que le docteur pût trouver la potion salutaire qu’il avait si bien recommandée, et il chercha long-temps et avec fracas