Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/276

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— Franchement, lui répondit Douglas, je ne pourrais vous blâmer de tenter cette évasion. Néanmoins, pour ce seul fait, mon père, ou mon oncle, ou le comte, ou l’un de mes frères, ou en un mot tous les lords du roi entre les mains desquels vous viendriez à tomber, vous feraient pendre comme un chien, ou comme une sentinelle qui a quitté son poste ; et je vous promets que vous ne leur échapperiez pas facilement. Mais dirigeons-nous vers l’île de Saint-Serf ; il s’élève une brise de l’ouest, et au vent de l’île nous ferons une bonne pêche à l’endroit où le courant est le plus fort. Lorsque nous aurons pêché pendant une heure, nous reprendrons l’entretien.

Leur pêche fut heureuse ; mais jamais deux pêcheurs à la ligne ne furent plus silencieux.

Lorsque la pêche fut finie, Douglas prit les rames à son tour, et par son ordre Roland Græme prit le gouvernail en dirigeant la barque vers le lieu où ils devaient débarquer. Mais de son côté Douglas s’arrêta au milieu de sa course, et après avoir jeté les yeux autour de lui, il dit à Roland :

« Il y a une chose que je pourrais vous révéler ; mais il s’agit d’un secret si profond que même ici, entourés comme nous le sommes par les eaux et le ciel sans qu’on puisse nous entendre, je ne puis prendre sur moi de le découvrir.

— Il vaut mieux qu’il reste caché, monsieur, répondit Roland Græme, si vous doutez de l’honneur de celui qui peut peut vous entendre.

— Je ne doute pas de votre honneur ; mais vous êtes jeune, imprudent et inconstant ?

— Jeune ! je le suis ; je puis être imprudent aussi ; mais qui vous a dit que je fusse inconstant ?

— Une personne qui vous connaît mieux peut-être que vous ne vous connaissez vous-même.

— Je suppose que vous voulez dire Catherine Seyton, » reprit le page dont le cœur battait à ce nom ; « mais elle est elle-même cinquante fois plus inconstante dans son humeur que les flots qui nous ballottent.

— Mon jeune ami, reprit Douglas, je vous prie de vous rappeler que Catherine Seyton est une dame d’un sang et d’une naissance nobles, et qu’on ne doit pas en parler si légèrement.

— Maître George de Douglas, ces paroles m’ont tout l’air d’une menace ; mais je vous prie d’observer que je fais aussi peu de cas