Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/62

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volailles, du daim, de la chèvre, des lièvres, diverses espèces de poissons, ainsi que de gros pains, des gâteaux, et divers mets composés de fruits et de miel. Les oiseaux sauvages, dont il y avait abondance, n’étaient pas servis sur des plats, mais fixés sur des brochettes en bois ; ils étaient offerts par les pages et les serviteurs qui les présentaient successivement à chaque convive, lequel en coupait alors ce que bon lui semblait. Une coupe d’argent était en outre placée devant chaque personne de rang ; ceux qui se trouvaient assis à la partie inférieure de la table étaient munis de larges verres en corne.

Le repas allait commencer, quand le majordome ou intendant, élevant tout-à-coup sa baguette, s’écria : « Arrêtez ! place pour lady Rowena. »

Une porte latérale, vers la partie inférieure de la salle, s’ouvrit alors de derrière la table du banquet, et Rowena fit son entrée, suivie de quatre de ses femmes. Cedric, quoique surpris, et peu agréablement, sans doute, de voir paraître Rowena dans une telle occasion, se hâta d’aller à sa rencontre, et de la conduire, avec un respectueux cérémonial, vers le grand siège placé à sa droite, et réservé à la dame du manoir. Tous les convives se levèrent pour la recevoir, et répondant à leur courtoisie par un salut muet, elle s’avança avec une grâce charmante pour prendre sa place au banquet. Avant qu’elle ne fût assise, le templier dit au prieur à voix basse : « Je ne porterai point un de vos colliers d’or au tournoi. Le vin de Chios vous appartient.

— Ne vous l’avais-je pas dit ? répondit le prieur ; mais retenez vos transports, le franklin vous regarde. » Négligeant cet avis, et accoutumé d’ailleurs à agir d’après la subite impulsion de ses propres désirs, Brian de Bois-Guilbert tint ses yeux constamment attachés sur Rowena, dont la beauté faisait sur lui une impression d’autant plus forte qu’elle différait entièrement de celle des femmes qu’il avait vues dans l’Orient.

Possédant les plus belles proportions de son sexe, Rowena était d’une taille élevée, non assez cependant pour surprendre. Son teint était d’une blancheur éclatante ; mais le noble aspect de ses traits empêchait de naître la fadeur quelquefois attachée aux beautés les plus séduisantes. Ses yeux bleus, surmontés de sourcils pleins de grâce, semblaient créés pour captiver et attendrir, comme pour commander ou prier. Si la douceur était l’expression naturelle de sa physionomie, il était évident que l’exercice habituel du comman-