Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/331

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partie : tout fut apporté à la masse, pour que le chef en fît la répartition.

Le lieu du rendez-vous était un vieux chêne. Ce n’était cependant pas celui sous lequel Locksley avait conduit Gurth et Wamba au commencement de notre histoire, mais un autre qui s’élevait au milieu d’un amphithéâtre champêtre, distant d’un demi-mille du château incendié de Torquilstone. Locksley prit place sur un trône de gazon, sous les branches entrelacées de cet arbre immense, et sa troupe se rangea en demi-cercle autour de lui. Il invita le chevalier à s’asseoir à sa droite, et Cedric à sa gauche.

« Pardonnez la liberté que je prends, nobles seigneurs, dit-il, mais dans ces forêts je suis monarque, et mes sujets peu civilisés perdraient le respect dû à ma puissance si, dans mes propres domaines, je cédais ma place à qui que ce soit. Mais, j’y pense, qui de vous a vu notre chapelain ? où donc est notre joyeux moine ? Une messe commence très bien les travaux de la journée pour des chrétiens. » Personne n’avait vu l’ermite de Copmanhurst. « Plaise à Dieu que mes pressentiments ne me trompent pas ! continua Locksley : il s’est sans doute oublié auprès de la bouteille. Quelqu’un l’a-t-il vu depuis la prise du château ?

— Je l’ai vu, dit Miller, fort affairé après la porte d’une cave, jurant par tous les saints du calendrier qu’il goûterait des vins de Gascogne de Front-de-Bœuf.

— Et, nous en préservent tous les saints ! dit le capitaine, il aura bu trop largement de ces bons vins, et il aura été enseveli sous les ruines du château ! Pars, Miller ; prends du monde avec toi ; cherche à reconnaître l’endroit où tu l’as vu ; puise de l’eau dans le fossé pour arroser les décombres encore fumants de la forteresse. Fallût-il enlever pierre à pierre, je retrouverai mon joyeux chapelain. »

Le grand nombre de ceux qui s’offrirent pour ce service, malgré l’intérêt que chacun prenait à la distribution du butin, montra combien la troupe avait à cœur la sûreté de son père spirituel.

« En attendant, dit Locksley, procédons au partage ; car, ne nous y trompons point, lorsque le bruit de notre étonnant succès se sera répandu, les troupes de de Bracy, de Malvoisin et des autres alliés de Front-de-Bœuf vont se mettre en mouvement pour venir nous attaquer, et il serait à propos de songer de bonne heure à faire retraite. » Puis se tournant vers le Saxon ; « Noble Cedric, dit-il, ce butin est divisé en deux parts : choisis celle que tu préfé-