Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/318

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mais les chefs s’en inquiétèrent d’autant moins que ce retard donnait à Ulrique le temps d’exécuter son plan de diversion, quel qu’il pût être.

Cependant, le radeau étant terminé ; « Il ne faut pas tarder davantage, dit le chevalier Noir ; le soleil baisse, et une affaire importante m’appelle ailleurs : elle ne me permet pas de rester un jour de plus avec vous. D’un autre côté, il serait fort étonnant que nous n’eussions pas bientôt sur les bras une troupe de cavaliers venant d’York : hâtons-nous donc de mettre à fin notre entreprise. Que l’un de vous aille trouver Locksley, pour lui dire de faire une décharge de traits de l’autre côté du château, et de se porter en avant comme s’il s’apprêtait à donner l’assaut. Quant à vous, braves Anglais, secondez-moi de tout votre courage, et tenez-vous prêts à jeter ce pont sur le fossé dès que la poterne de notre côté s’ouvrira. Suivez-moi hardiment de l’autre côté, et venez m’aider à enfoncer cette porte de sortie pratiquée dans le mur principal du château. Ceux d’entre vous qui ne se soucieront pas de venir à l’attaque, ou qui n’ont pas des armes convenables, garniront le haut de cette fortification extérieure ; que de là ils balaient par une grêle de flèches bien dirigées tout ce qui se présentera sur les remparts. Noble Cedric, veux-tu te charger du commandement de ceux qui restent ici ?

— Non, de par l’âme d’Hereward, répondit le Saxon : je suis incapable de commander aux autres ; mais que ma mémoire soit maudite par la postérité si je ne marche pas un des premiers à ta suite aussitôt que tu auras donné le signal. C’est ma propre querelle qui se vide ici, et ma place est à l’avant-garde.

— Considère cependant, noble Saxon, que tu n’as ni haubert, ni corselet, ni aucune autre armure que ce casque, ce petit bouclier et cette épée : c’est bien peu de chose !

— Tant mieux ! je n’en serai que plus léger pour escalader ces murailles. Sans vouloir me vanter, sire chevalier, je te dis que tu verras aujourd’hui un Saxon se présenter au combat la poitrine entièrement nue, avec autant d’intrépidité qu’un Normand couvert de son corselet de fer.

— Eh bien ! s’écria le chevalier, au nom de Dieu, que l’on ouvre la poterne et qu’on lance le pont. »

La porte qui conduisait de la barbacane au fossé, et qui correspondait à la porte percée dans le mur principal du château, s’ouvrit alors tout-à-coup ; et le pont volant fut lancé en travers du fossé, dont il fit rejaillir l’eau de tous côtés ; mais il ne pouvait donner