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nos pères. Nous regrettons de ne pouvoir accepter votre polie invitation. Demain lady Rowena se chargera des fonctions auxquelles vient de l’appeler le libre choix du vainqueur, confirmé par les acclamations du peuple. » Disant ces mots, il prit la couronne et la mit sur la tête de Rowena pour montrer qu’elle acceptait l’autorité temporaire qui lui était conférée.

« Que dit-il ? « demanda le prince Jean, feignant de ne pas entendre le saxon qui lui était cependant bien familier. Le sens du discours de Cedric fut répété en français par un des courtisans du prince. « C’est bien, dit celui-ci, demain nous accompagnerons au siège de sa dignité cette reine muette. Vous au moins, sire chevalier, en se retournant vers le vainqueur resté près de la galerie, vous prendrez part à notre banquet. » Le chevalier, parlant pour la première fois d’une voix un peu basse et hâtée, s’excusa en faisant valoir ses fatigues, le besoin qu’il avait de repos, et la nécessité de se préparer au combat du lendemain. « À merveille, dit le prince Jean avec hauteur : bien que nous soyons peu accoutumé à de pareils refus, nous tâcherons d’égayer le festin en l’absence du vainqueur et de la reine de la beauté » À ces mots, il quitta la lice avec sa suite, et son départ fut le signal de l’écoulement de la foule.

Cependant, avec un souvenir vindicatif, qui est le propre de l’orgueil offensé, surtout lorsqu’il s’y joint la conviction intime d’un manque total de mérite, Jean eut à peine fait trois pas, que, regardant autour de lui, il attacha son œil plein de colère sur l’archer qui lui avait déplu au commencement du jour, et qui avait porté ce prince à ordonner à ses hommes d’armes de le surveiller de près : « Votre tête m’en répond ; ne souffrez point qu’il s’évade. » L’archer soutint le regard courroucé du prince avec le même sang-froid qu’il avait montré le matin, et il dit avec un sourire : « Je n’ai pas l’intention de quitter Ashby avant deux jours ; il faut que je voie comment les archers des comtés de Strafford et de Leicester manient leurs arcs ; les forêts de Needwood et de Charnwood nourrissent, je le pense, de bons tireurs, elles offrent de quoi les exercer.

— Et moi, dit le prince Jean à son cortège, sans daigner adresser une réponse directe à l’yeoman, je veux voir comment il tire le sien, et malheur à lui si son adresse ne suffit pas pour excuser son insolence.

— Il est plus que temps, dit Bracy, que l’outre-cuidance de ces paysans soit rabaissée par quelque exemple frappant. »

Waldemar Fitzurse, qui pensait probablement que son maître ne