Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/404

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il poursuit l’accomplissement de ses desseins farouches. »

Morton rejoignit bientôt la jeune fille, que la chute de l’arbre avait effrayée. Il lui dit que c’était l’effet d’un accident ; celle-ci lui apprit que l’habitant de la caverne n’en éprouverait aucun inconvénient, parce qu’il avait une provision d’arbres pour construire un autre pont.

Les aventures de la matinée n’étaient point terminées. Comme ils approchaient de la cabane, la petite fille poussa un cri de surprise en voyant sa grand’mère venir au devant d’eux à une plus grande distance de sa demeure qu’elle ne la croyait capable de le faire.

« Oh ! monsieur, monsieur ! » dit la vieille femme quand elle les entendit s’approcher, « si vous avez jamais aimé lord Evandale, voici le moment de le secourir, ou jamais… Que Dieu soit loué de m’avoir laissé l’ouïe quand il m’a enlevé la vue. Venez par ici… par ici… et marchez légèrement… Peggy, cours, selle le cheval de monsieur, et conduis-le derrière le buisson d’épines, où tu l’attendras. »

Elle conduisit alors Morton près d’une étroite fenêtre par laquelle il pouvait, sans être aperçu, voir deux dragons assis devant un pot d’ale, buvant leur coup du matin, et s’entretenant fort sérieusement.

« Plus j’y pense, disait l’un d’eux, moins cela me plaît, Inglis : Evandale était un bon officier et l’ami du soldat ; et s’il nous a punis pour notre mutinerie de Tillietudlem, ma foi, vous conviendrez que nous l’avions mérité. — Le diable m’emporte si jamais je le lui pardonne ! répondit Inglis ; maintenant je vais le tenir à mon tour… — Vous devriez oublier cela… Nous ferions mieux de l’aller trouver, et de nous réunir aux montagnards révoltés. Nous avons mangé le pain du roi Jacques. — Tu n’es qu’un sot ; pourquoi irions-nous le trouver ? Il a laissé passer le moment parce que Holliday a vu un esprit, et que miss Bellenden a des vapeurs, ou quelque autre mal imaginaire… Le secret ne sera pas gardé encore deux jours, et la récompense revient à celui qui chantera le premier. — Tu as raison. Mais ce Basile Olifant paiera-t-il bien ? — Comme un prince. Evandale est l’homme qu’il hait le plus, et il craint aussi d’avoir quelque procès avec lui ; il pense que s’il en était une fois débarrassé, tout irait bien pour lui. — Mais aurons-nous un mandat d’arrêt, et serons-nous en force ? Peu de gens seront disposés à agir contre