Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/394

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nemi ? — Quel ennemi ? Pouvez-vous connaître particulièrement John Balfour de Burley, et ignorer qu’il a de cruels et fréquents combats à soutenir contre l’esprit malin ? L’avez-vous jamais vu seul, une Bible à la main et son épée nue sur ses genoux ? Couché dans la même chambre que lui, ne l’avez-vous jamais entendu se débattre dans ses songes contre les illusions de Satan ? Oh ! vous le connaissez bien mal si vous ne l’avez vu qu’en plein jour ; car il dérobe soigneusement à tous les yeux le spectacle de ses funestes visions et de ses luttes cruelles. Mais je l’ai vu, moi, trembler si fort après un de ces accès de délire, qu’un enfant l’aurait terrassé, tandis que des gouttes de sueur ruisselaient sur son front comme jamais pluie d’orage n’est tombée sur mon pauvre toit de chaume. »

Pendant qu’elle parlait, Morton commença à se rappeler l’agitation de Burley pendant son sommeil dans le grenier de Milnwood ; l’incohérence de ses discours, dont lui avait parlé Cuddie ; ses extases, ses combats contre le mauvais esprit, objet fréquent des entretiens des caméroniens. Il en conclut que cet homme lui-même était victime de ses propres illusions, qu’il avait la force de dissimuler aux yeux de ceux dont il recherchait la considération, tandis qu’il ne s’abandonnait aux accès de cette espèce d’épilepsie que devant les personnes auxquelles il pouvait donner de lui une idée plus élevée. Il était naturel de supposer qu’une ambition trompée, des espérances déçues, et la ruine d’un parti qu’il avait défendu avec une fidélité inébranlable, avaient, en l’exagérant, changé son enthousiasme en une sorte de folie temporaire. En effet, il arriva plus d’une fois, dans ces temps d’effervescence, que des hommes tels que sir Henry Vane, Harrison, Overton, et d’autres, dominés eux-mêmes par un fanatisme extravagant, pussent en public se conduire non-seulement avec bon sens dans des situations difficiles, et avec courage dans le péril, mais encore avec l’adresse la plus rare et la valeur la plus déterminée. La suite des renseignements que lui donnait mistress Maclure confirma Morton dans cette opinion.

« Au point du jour, dit-elle, ma petite Peggy vous servira de guide, avant que les soldats soient sur pied ; mais il faudra laisser passer son heure de danger, comme il dit, avant de pénétrer dans son lieu de refuge. Peggy vous dira quand vous pourrez entrer : elle est au fait de tout cela, car c’est elle qui lui porte le peu de provisions dort il a besoin pour soutenir sa vie. — Et dans quel endroit ce malheureux s’est-il donc réfugié ? dit Morton. — Dans