Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/296

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Claverhouse déjà à leur tête. Le colonel n’eut pas plus tôt vu Morton qu’il s’avança vers lui, et lui adressa la parole avec une extrême politesse.

« Je pense que ce n’est pas la première fois que je vois monsieur Morton de Milnwood. — Ce n’est pas la faute du colonel Graham, dit Morton, si ma présence est maintenant importune à lui ou à quelque autre. — Permettez-moi au moins de dire, répliqua Claverhouse, que la situation actuelle de monsieur Morton justifie l’opinion que j’avais conçue de lui, et que ma conduite, la dernière fois que nous nous sommes rencontrés, n’était que conforme à mon devoir. — Conformer vos actions à votre devoir, et votre devoir à votre conscience, c’est votre affaire et non la mienne, » dit Morton justement offensé de ce qu’on voulait en quelque façon l’obliger à approuver la sentence si récemment prononcée contre lui. — Encore un instant, dit Claverhouse. Evandale prétend que j’ai des torts à réparer envers vous. Je vous assure que je ne confondrai jamais un homme, un gentilhomme d’un esprit élevé, qui, même dans ses erreurs, agit par des principes honorables, avec ces imbéciles et grossiers fanatiques qui marchent sous les ordres de chefs altérés de sang et souillés de meurtre. Si donc ils ne consentent pas à se séparer sur-le-champ, je vous prie avec instance de revenir à l’armée royale et de faire votre paix particulière, car soyez bien assuré qu’ils ne tiendront pas contre nous une demi-heure. Si vous suivez ce conseil, demandez-moi à votre arrivée. Montmouth, quoique cela paraisse étrange, Montmouth ne peut vous protéger ; Dalzell ne le veut pas. Quant à moi, je le veux et le puis, et j’ai promis à Evandale de le faire si l’occasion s’en présentait. — Je devrais des remercîments à lord Evandale, » répliqua Morton froidement, « s’il ne paraissait me croire capable d’abandonner ceux dont j’ai embrassé la cause. Quant à vous, colonel Graham, si vous voulez m’accorder l’honneur d’une autre espèce de satisfaction, il est probable que, dans une heure, vous me trouverez au bout du pont de Bothwell, du côté du couchant, l’épée à la main. »

Ils se saluèrent et se séparèrent.

« C’est un estimable garçon, Lumley, » dit Claverhouse en s’adressant à l’officier qui avait escorté Morton ; « mais c’en est fait de lui… Que son sang retombe sur sa tête ! »

En parlant ainsi il fit ses préparatifs pour le combat.