Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/291

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serais affligé qu’il en fût ainsi, reprit Morton ; mais je n’en dois pas moins persévérer à vous demander à voir le duc. — Lumley, » dit l’officier du grade le plus élevé, « annoncez au duc l’arrivée de M. Morton, et rappelez-lui que c’est l’officier dont lord Evandale a parlé avec tant d’éloges. »

L’officier revint annoncer que le général ne pouvait voir M. Morton ce soir-là, mais qu’il le recevrait le lendemain dans la matinée ; et on le conduisit dans une chaumière voisine, où il fut surveillé toute la nuit ; mais on le traita avec civilité, et on pourvut à ce qu’il ne manquât de rien. Le lendemain, de bonne heure, le capitaine Lumley vint le prendre pour le conduire devant le duc de Montmouth.

L’armée se formait déjà en colonnes pour se mettre en marche ou pour prendre son ordre de bataille. Le duc se tenait au centre à un demi-mille environ de l’endroit où Morton avait passé la nuit. En s’avançant à cheval vers le général, Henri put évaluer la force de cette armée. Il s’y trouvait trois ou quatre régiments anglais, l’élite des troupes de Charles II ; le régiment des gardes écossais, brûlant du désir de venger leur défaite ; plusieurs autres régiments écossais, avec un nombreux corps de cavalerie, composé en partie de gentilshommes qui servaient comme volontaires, en partie des vassaux de la couronne que leurs fiefs soumettaient au service militaire. Morton remarqua aussi plusieurs compagnies de montagnards, levées sur les points les plus voisins de la frontière des basses terres. Ces hommes étaient l’effroi des presbytériens de l’ouest, pour lesquels ils montraient autant de haine que de mépris. Ils étaient commandés chacun par son chef. Un train nombreux d’artillerie de campagne accompagnait cette armée, qui avait l’air si imposant qu’en la voyant Morton fut convaincu qu’une faveur spéciale du ciel pouvait seule sauver d’une complète destruction les presbytériens, aussi mal équipés que mal disciplinés. L’officier qui accompagnait Morton cherchait à lire dans ses yeux les sentiments qu’excitait en lui le brillant spectacle de ces forces militaires. Mais fidèle à la cause qu’il avait embrassée, Henri parvint à cacher l’inquiétude qu’il éprouvait ; il regarda sans étonnement et avec indifférence ces formidables préparatifs.

« Vous voyez la fête qu’on vous prépare, dit l’officier. — Si je n’avais du goût pour ces sortes de spectacles, répliqua Morton, je ne serais pas avec vous en ce moment. Cependant je me réjoui-