Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/184

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qui, quoiqu’un complet Boanerges (ou fils du tonnerre) quand il était en chaire et que l’ennemi était loin, se taisait peu, ainsi que nous l’avons vu, même quand il se trouvait en son pouvoir. Il avait perdu l’usage de la parole en entendant la fusillade et les cris qui partaient de la vallée, et il se trouvait dans la situation où plus d’un honnête homme peut se trouver, ne pouvant ni combattre ni fuir. Sa frayeur l’empêchait de saisir une occasion aussi favorable de prêcher les terreurs presbytériennes, ainsi que s’y attendait la courageuse Mause ; il n’avait pas même la force de prier pour le succès de la bataille. Cependant sa présence d’esprit ne l’avait pas entièrement abandonné, pas plus que son zèle pour soutenir sa réputation de prédicateur pur et zélé de la sainte parole.

« Silence, femme ! dit-il, et n’interromps pas mes méditations et la lutte que j’ai à soutenir. Mais en vérité, le feu des ennemis commence à augmenter ! Il pourrait se faire que quelque balle nous atteignît ici, et je vais m’enfoncer derrière ce tertre comme derrière un rempart. » — « C’est un poltron après tout, » dit Cuddie, qui lui-même ne manquait nullement de cette espèce de courage qui naît de l’ignorance du danger. « Il ne portera jamais le bonnet de Rumbleberry. Bah ! Rumbleberry se battait et courait comme un dragon volant. C’est bien dommage, le pauvre homme ! qu’il n’ait pas pu échapper à la potence, mais on dit qu’il y marcha en chantant et en se réjouissant, comme j’irais prendre une écuelle de bouillon, en supposant que je sois affamé, ce qui ne tardera sûrement pas à m’arriver. Eh ! mon Dieu ! voilà un tableau effrayant, et cependant on ne saurait en détourner les yeux. »

Effectivement, d’un côté la curiosité de Morton et de Cuddie, de l’autre l’enthousiasme ardent de la vieille Mause, les retinrent sur le lieu d’où ils pouvaient le mieux entendre et voir le résultat de l’action, laissant Kettledrummle seul dans son refuge ; Les vicissitudes du combat que nous avons déjà décrites se déployaient aux yeux de nos spectateurs, qui étaient placés sur le haut d’une colline ; mais ils ne pouvaient en apercevoir le résultat. Les presbytériens leur semblaient se défendre vigoureusement. On en pouvait juger d’après la fumée épaisse, qui, éclairée par de fréquentes lueurs, couvrait alors la vallée et cachait dans ses ombres sulfureuses les deux partis combattant. De l’autre côté, le feu continuel qui partait du point le plus voisin du ma-