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vieux Kilsythe, et un autre cheval pour vous. — J’espère qu’il n’y a pas de mauvaises nouvelles de la tour, monsieur ? » dit Pike, étonné de l’émotion subite de son maître. — « Oui,… non…, oui… ; c’est-à-dire qu’il faut que je voie Claverhouse, il s’agit d’une affaire importante ; ainsi, mets tes bottes et selle les chevaux le plus promptement possible… Seigneur, dans quels temps sommes-nous !… Le pauvre garçon !… Le fils de mon vieil ami !… et l’imbécile de fille fourre cela dans ce qu’elle appelle son post-scriptum, à la suite de tout ce bavardage de vieilles robes et de nouveaux romans ! »

Au bout de quelques minutes, le bon vieil officier fut complètement équipé ; et étant monté sur son cheval, aussi tranquillement que Marc-Antoine l’aurait fait lui-même, il se mit en route pour la tour de Tillietudlem.

Chemin faisant, il forma la prudente résolution de ne rien dire à la vieille dame de la qualité et du rang du prisonnier détenu dans son château ; il connaissait trop sa haine invétérée pour les presbytériens de tous genres. Il se détermina donc à essayer de sa propre influence sur Claverhouse pour obtenir la liberté de Morton.

« Puisque il est si loyal, il fera quelque chose pour un vieux cavalier comme moi[1] se disait le vétéran, « et s’il est aussi bon soldat que le monde le dit, eh bien, il sera fort aise de rendre service au fils d’un vieux soldat. Je n’ai jamais vu de véritable militaire qui ne fût honnête homme et n’eut un cœur franc ; et je crois que l’exécution des lois, quelle que soit la rigueur qu’on juge à propos de leur donner (quoiqu’il soit malheureux qu’on trouve nécessaire de les rendre aussi rigoureuses), est dix mille fois mieux entre leurs mains qu’entre celles des hommes de loi, gens à petite vue, et des gentilshommes campagnards à tête lourde et épaisse. »

Telles étaient les réflexions du major Miles de Bellenden ; elles se terminèrent quand John Gudyill, moitié ivre, saisit la bride de son cheval et l’aida à descendre dans la cour mal pavée de Tillietudlem. — Comment, John, dit le vétéran, quelle diable de discipline est la vôtre ! vous avez déjà lu l’Écriture sainte ce matin ? — J’ai lu les litanies, » dit John en secouant la tête d’un air de gravité que lui donnait l’ivresse, quoiqu’il n’eût saisi qu’un mot de la phrase du major ; « la vie est courte, monsieur ; nous sommes

  1. Cavalier, nom que se donnaient les royalistes. a. m.