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Son nom roule et grossit ainsi qu’une avalanche ;
Aux Turcomans domptés il fait mordre le sol,
Devant ses pas vainqueurs avec lui l’aigle blanche
        Porte en tous lieux son vol.

Quand il prit son chemin par le pays des Slaves,
Ceux-ci, voyant pareils leur langage et leur foi,
Sous le joug étranger fatigués d’être esclaves,
        Le saluèrent roi.

Trop heureux si, content de régner avec gloire
Sur les peuples nombreux à son trône soumis,
Il eût su maîtriser ses ardeurs de victoire
        Comme ses ennemis.

Le fidèle conseil souvent lui disait : « Sire,
Assez comme cela ; c’est assez de hauts faits.
Vaincre est beau ; mais la gloire est plus grande, à vrai dire,
        Qu’on gagne dans la paix. »

Mais Rome parlait haut à couvrir ce langage ;
Le monde l’appelait ; et, de tout oublieux,
Il part, et, sous Varna, contre les Turcs engage
        Un combat périlleux.

Les plus terribles coups, épouvante et mort pâle
Allaient dans la mêlée où son glaive avait lui,
Et tous ceux que touchait sa cuirasse royale
        Tombaient fauchés par lui.

Pour finir le combat que sa valeur prolonge,
Les Spahis, à grands cris, contre lui fondent tous,
Et dans son front privé du casque la mort plonge
        Avec leurs mille coups.