Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/385

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quatre mots, et nous y eussions donné tous notre assentiment. Quant à moi, s’il me falloit employer autant de paroles et de temps pour apprendre une chose d’une aussi petite importance, j’avoue que je ne m’y résignerais qu’avec peine. Nos maîtres nous en disent beaucoup plus ; ils sont bien plus confiants : il n’est rien qui les arrête ; ils prennent tout sur eux et décident de tout. Rien ne les détourne de leur dessein, rien ne les étonne, quoi qu’il arrive ; lorsqu’ils se sentent trop pressés, une équivoque ou le distinguo les sauvent de tout embarras. Bien plus, soyez certain que leur méthode sera toujours préférée à la vôtre, qui doute de tout, et qui craint tellement de broncher, qu’en piétinant sans cesse elle n’avance jamais.

Eudoxe. Je n’ai jamais eu dessein de prescrire à quelque homme que ce fût la méthode qu’il doit suivre dans la recherche de la vérité, mais seulement d’exposer celle dont je me suis servi, afin que, si on la trouve mauvaise, on la repousse ; si on la trouve bonne et utile, d’autres s’en servent aussi ; et j’ai toujours laissé au jugement de chacun liberté entière de la rejeter ou de l’admettre. Si l’on dit maintenant qu’elle m’a peu avancé, c’est à l’expérience d’en décider ; et je suis certain, pour peu que vous continuiez de me prêter votre attention, que vous avouerez vous-mêmes que nous ne pouvons pas prendre trop de précaution pour