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Épistemon. J’ai peine à voir que vous méprisiez cet arbre de Porphyre qui a toujours excité l’admiration des érudits, et je suis fâché que vous vouliez montrer à Polyandre quel il est, par une autre voie que celle qui depuis si longtemps est admise dans les écoles. Jusqu’à ce jour, en effet, on n’y a pas trouvé de moyen meilleur ni plus propre à nous apprendre ce que nous sommes qu’en mettant successivement sous nos yeux tous les degrés qui constituent la totalité de notre nature, afin que par ce moyen, en remontant et en descendant par tous les degrés, nous puissions reconnoître ce que nous avons de commun avec les autres êtres, et ce en quoi nous en différons. C’est là le plus haut point auquel puisse atteindre notre science.

Eudoxe. Je n’ai eu ni n’aurai jamais l’intention de blâmer la méthode qu’on emploie dans les écoles ; c’est à elle que je dois le peu que je sais, et c’est de son secours que je me suis servi pour reconnoitre l’incertitude de tout ce que j’y ai appris. Aussi, quoique mes maîtres ne m’aient rien enseigné de certain, je leur dois toutefois des actions de grâces pour avoir appris d’eux à le reconnoître ; et je leur en dois de plus grandes, parce que les choses qu’ils m’ont apprises sont douteuses, que si elles eussent été plus conformes à la raison ; car, dans ce cas, je me fusse peut-être contenté du peu de raison que j’y aurois découvert, et cela