Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/220

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l’aperçoit pas, mais n’est jamais mal faite, même par l’esprit le moins accoutumé à raisonner. Cette opération n’emprunte pas un grand secours des liens dans lesquels la dialectique embarrasse la raison humaine, en pensant la conduire ; encore bien que je sois loin de nier que ces formes ne puis­sent servir à d’autres usages. Ainsi, toutes les er­reurs dans lesquelles peuvent tomber, je ne dis pas les animaux, mais les hommes, viennent, non d’une induction fausse, mais de ce qu’on part de certaines expériences peu comprises, ou qu’on porte des jugements hasardés et qui ne reposent sur aucune base solide.

Tout ceci démontre comment il se fait que l’a­rithmétique et la géométrie sont de beaucoup plus certaines que les autres sciences, puisque leur objet à elles seules est si clair et si simple, qu’elles n’ont besoin de rien supposer que l’expérience puisse révoquer en doute, et que toutes deux pro­cèdent par un enchaînement de conséquences que la raison déduit l’une de l’autre. Aussi sont-elles les plus faciles et les plus claires de toutes les sciences, et leur objet est tel que nous le désirons ; car, à part l’inattention, il est à peine supposable qu’un homme s’y égare. Il ne faut cependant pas s’étonner que beaucoup d’esprits s’appliquent de préférence à d’autres études ou à la philosophie. En effet chacun se donne plus hardiment le droit