Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome V.djvu/255

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quefois, lors même que la nue étant fort petite, ou ne s’abaissant que fort peu, il est si foible qu’on ne le sent quasi pas en l’air libre, s’entonnant dans les tuyaux des cheminées, fait jouer les cendres et les fétus qui se trouvent au coin du feu, et y excite comme de petits tourbillons assez admirables pour ceux qui en ignorent la cause, et qui sont ordinairement suivis de quelque pluie. Mais si la nue qui descend est fort pesante et fort étendue (comme elle peut être plus aisément sur les grandes mers qu’aux autres lieux, à cause que les vapeurs y étant fort également dispersées, sitôt qu’il s’y forme la moindre nue en quelque endroit, elle étend incontinent en tous les autres circonvoisins), cela cause infailliblement une tempête, laquelle est d’autant plus forte que, la nue est plus grande et pesante, et dure d’autant plus long-temps que la nue descend de plus haut. Et c’est ainsi que je m’imagine que se font ces travades que les mariniers craignent tant en leurs grands voyages, particulièrement un peu au-delà du cap de Bonne-Espérance, où les vapeurs qui s’élèvent de la mer Éthiopique, qui est fort large et fort échauffée par le soleil, peuvent aisément causer un vent d’abas, qui arrêtant le cours naturel de celles qui viennent de la mer des Indes les assemble en une nue, laquelle, procédant de l’inégalité qui est entre ces deux grandes mers et cette terre, doit devenir in-