Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome V.djvu/183

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l’humidité, mais aussi sont comme autant de petits bâtons plantés çà et là entre leurs parties, où, demeurant fermes et sans se plier, elles les soutiennent et empêchent que les autres plus pliantes qui sont parmi, ne les désarrangent en les agitant, et ainsi ne corrompent le corps qu’elles composent ; ce qui fait aussi que ces chairs, par succession de temps, deviennent plus dures ; au lieu que les parties de l’eau douce, en se pliant et se glissant par-ci par-là dans leurs pores, pourroient aider à les ramollir et à les corrompre. De plus, ce n’est pas merveille que l’eau salée soit plus pesante que la douce, puisqu’elle est composée de parties qui, étant plus grosses et plus massives, peuvent s’arranger en moindre espace ; car c’est de là que dépend la pesanteur. Mais il est besoin de considérer pourquoi ces parties plus massives demeurent mêlées avec les autres qui le sont moins, au lieu qu’il semble qu’elles devroient naturellement aller au-dessous ; et la raison en est, au moins pour celles du sel commun, qu’elles sont également grosses par les deux bouts et toutes droites, ainsi qu’autant de petits bâtons ; car s’il y en a jamais eu dans la mer qui fussent plus grosses par un bout que par l’autre, ayant été par même moyen plus pesantes, elles ont eu tout loisir d’aller au fond depuis que le monde est ; ou, s’il y en a eu de courbées, elles ont eu loisir de rencontrer des corps