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quelque petit mal en une personne qu’on pense en être digne. On a de la haine pour ce mal, et on a de la joie de le voir en celui qui en est digne. Et lorsque cela survient inopinément (465), la surprise de l’admiration est cause qu’on s’éclate de rire, suivant ce qui a été dit ci-dessus de la nature du ris. Mais ce mal doit être petit ; car, s’il est grand, on ne peut croire que celui qui l’a en soit digne, si ce n’est qu’on soit de fort mauvais naturel ou qu’on lui porte beaucoup de haine.

Art. 179. Pourquoi les plus imparfaits ont coutume d’être les plus moqueurs.

Et on voit que ceux qui ont des défauts fort apparents, par exemple, qui sont boiteux, borgnes, bossus, ou qui ont reçu quelque affront en public, sont particulièrement enclins à la moquerie. Car, désirant voir tous les autres aussi disgraciés qu’eux, ils sont bien aises des maux qui leur arrivent, et ils les en estiment dignes.

Art. 180. De l’usage de la raillerie.

Pour ce qui est de la raillerie modeste, qui reprend utilement les vices en les faisant paraître ridicules, sans toutefois qu’on en rie soi-même ni