Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome IV.djvu/154

Cette page n’a pas encore été corrigée

ont coutume en nous de les suivre, et auxquels elles incitent notre âme à consentir, il n’est pas néanmoins toujours bon, d’autant qu’il y a plusieurs choses nuisibles au corps qui ne causent au commencement aucune tristesse ou même qui donnent de la joie, et d’autres qui lui sont utiles, bien que d’abord elles soient incommodes. Et outre cela, elles font paraître presque toujours, tant les biens que les maux qu’elles représentent, beaucoup plus grands et plus importants qu’ils ne sont, en sorte qu’elles nous incitent à rechercher les uns et fuir les autres avec plus d’ardeur et plus de soin qu’il n’est convenable. Comme nous voyons aussi que les bêtes sont souvent trompées par des appâts, et que pour éviter de petits maux elles se précipitent en de plus grands. C’est pourquoi nous devons nous servir de l’expérience et de la raison pour distinguer le bien d’avec le mal et connaître leur juste valeur, afin de ne prendre pas l’un pour l’autre, et de ne nous porter à rien avec excès. (432)

Art. 139. De l’usage des mêmes passions, en tant qu’elles appartiennent à l’âme, et premièrement de l’amour.

Ce qui suffirait si nous n’avions en nous que le corps ou qu’il fût notre meilleure partie ; mais, d’autant qu’il n’est que la moindre, nous devons