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exécuta ; il construisit l’échafaud d’un édifice immense, et laissa à d’autres le soin de construire l’édifice. Leibnitz fut tout ce qu’il voulut être : il porta dans la philosophie une grande hauteur d’intelligence ; mais il ne traita la science de la nature que par lambeaux, et ses systèmes métaphysiques semblent plus faits pour étonner et accabler l’homme que pour l’éclairer. Newton a créé une optique nouvelle, et démontré les rapports de la gravitation dans les cieux. Je ne prétends point ici diminuer la gloire de ce grand homme, mais je remarque seulement tous les secours qu’il a eus pour ces grandes découvertes. Je vois que Galilée lui avoit donné la théorie de la pesanteur ; Kepler, les lois des astres dans leurs révolutions ; Huygens, la combinaison et les rapports des forces centrales et des forces centrifuges ; Bacon, le grand principe de remonter des phénomènes vers les causes ; Descartes, sa méthode pour le raisonnement, son analyse pour la géométrie, une foule innombrable de connoissances pour la physique, et plus que tout cela peut-être, la destruction de tous les préjugés. La gloire de Newton a donc été de profiter de tous ces avantages, de rassembler toutes ces forces étrangères, d’y joindre les siennes propres, qui étoient immenses, et de les enchaîner toutes par les calculs d’une géométrie aussi sublime que profonde. Si maintenant je rapproche Descartes de ces trois