Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/67

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pareil plan, et il n’imaginoit pas pouvoir le remplir seul ; mais, pressé par le temps, il se hâtoit d’en exécuter quelques parties, et croyoit que la postérité achèveroit le reste. Il invitoit les hommes de toutes les nations et de tous les siècles à s’unir ensemble ; et, pour rassembler tant de forces dispersées, pour faciliter la correspondance rapide des esprits dans les lieux et les temps, il conçut l’idée d’une langue universelle qui établiroit des signes généraux pour toutes les pensées, de même qu’il y en a pour exprimer tous les nombres ; projet que plusieurs philosophes célèbres ont renouvelé, qui sans doute a donné à Leibnitz l’idée d’un alphabet des pensées humaines, et qui, s’il est exécuté un jour, sera probablement l’époque d’une révolution dans l’esprit humain.

J’ai tâché de suivre Descartes dans tous ses ouvrages ; j’ai parcouru presque toutes les idées de cet homme extraordinaire ; j’en ai développé quelques unes, j’en ai indiqué d’autres. Il a été aisé de suivre la marche de sa philosophie et d’en saisir l’ensemble. On l’a vu commencer par tout abattre afin de tout reconstruire ; on l’a vu jeter des fondements profonds ; s’assurer de l’évidence et des moyens de la reconnoître ; descendre dans son âme pour s’élever à Dieu ; de Dieu redescendre à tous les êtres créés ; attacher à cette cause tous les principes de ses connoissances ; simplifier ces principes