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à-fait inconnus : auquel sens je pense avoir assez démontré que l’esprit, considéré sans les choses que l’on a de coutume d’attribuer au corps, est plus connu que le corps considéré sans l’esprit : et c’est tout ce que j’avois dessein de prouver en cette seconde Méditation.

Mais je vois bien ce que vous voulez dire, c’est à savoir que, n’ayant écrit que six méditations touchant la première philosophie, les lecteurs s’étonneront que dans les deux premières je ne conclue rien autre chose que ce que je viens de dire tout maintenant, et que pour cela ils les trouveront trop stériles, et indignes d’avoir été mises en lumière. À quoi je réponds seulement que je ne crains pas que ceux qui auront lu avec jugement le reste de ce que j’ai écrit aient occasion de soupçonner que la matière m’ait manqué ; mais qu’il m’a semblé très raisonnable que les choses qui demandent une particulière attention, et qui doivent être considérées séparément d’avec les autres, fussent mises dans des méditations séparées. C’est pourquoi, ne sachant rien de plus utile pour parvenir à une ferme et assurée connoissance des choses que si, avant de rien établir, on s’accoutume à douter de tout et principalement des choses corporelles, encore que j’eusse vu il y a long-temps plusieurs livres écrits par les sceptiques et académiciens touchant cette matière, et que ce ne fût pas sans