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quand je le considère, c’est-à-dire quand je me considère moi-même, en tant que je suis seulement une chose qui pense, je ne puis distinguer en moi aucunes parties, mais je connois et conçois fort clairement que je suis une chose absolument une et entière. Et quoique tout l’esprit semble être uni à tout le corps, toutefois lorsqu’un pied, ou un bras, ou quelque autre partie vient à en être séparée, je connois fort bien que rien pour cela n’a été retranché de mon esprit. Et les facultés de vouloir, de sentir, de concevoir, etc., ne peuvent pas non plus être dites proprement ses parties : car c’est le même esprit qui s’emploie tout entier à vouloir, et tout entier à sentir et à concevoir, etc. Mais c’est tout le contraire dans les choses corporelles ou étendues : car je n’en puis imaginer aucune, pour petite qu’elle soit, que je ne mette aisément en pièces par ma pensée, ou que mon esprit ne divise fort facilement en plusieurs parties, et par conséquent que je ne connoisse être divisible. Ce qui suffiroit pour m’enseigner que l’esprit ou l’âme de l’homme est entièrement différente du corps, si je ne l’avois déjà d’ailleurs assez appris.

Je remarque aussi que l’esprit ne reçoit pas immédiatement l’impression de toutes les parties du corps, mais seulement du cerveau, ou peut-être même d’une de ses plus petites parties, à savoir de celle où s’exerce cette faculté qu’ils ap-