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parties de cette matière, en sorte qu’il en composât un chaos aussi confus que les poëtes en puisse feindre, et que par après il ne fît autre chose que prêter son concours ordinaire à la nature, et la laisser agir suivant les lois qu’il a établies. Ainsi, premièrement, je décrivis cette matière, et tâchai de la représenter telle qu’il n’y a rien au monde, ce me semble, de plus clair ni plus intelligible, excepté ce qui a tantôt été dit de Dieu et de l’âme ; car même je supposai expressément qu’il n’y avoit en elle aucune de ces formes ou qualités dont on dispute dans les écoles, ni généralement aucune chose dont la connoissance ne fût si naturelle à nos âmes qu’on ne pût pas même feindre de l’ignorer. De plus, je fis voir quelles étoient les lois de la nature ; et, sans appuyer mes raisons sur aucun autre principe que sur les perfections infinies de Dieu, je tâchai à démontrer toutes celles dont on eût pu avoir quelque doute, et à faire voir qu’elles sont telles qu’encore que Dieu auroit créé plusieurs mondes, il n’y en sauroit avoir aucun où elles manquassent d’être observées. Après cela, je montrai comment la plus grande part de la matière de ce chaos devoit, en suite de ces lois, se disposer et s’arranger d’une certaine façon qui la rendoit semblable à nos cieux ; comment cependant quelques unes de ses parties devoient composer une terre et quelques unes des planètes et des comètes, et