Page:Œuvres de Blaise Pascal, XII.djvu/406

Cette page n’a pas encore été corrigée

78 PENSÉES.

même 1, et, se considérant soutenu dans la masse que la nature lui a donnée, entre ces deux abîmes 2 de l’infini et du néant, il tremblera dans la vue de ses merveilles ; et je crois que sa curiosité se changeant en admiration, il sera plus disposé à les contempler en silence qu’à les rechercher avec présomption.

Car, enfin, qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout. Infiniment éloi gné de comprendre les extrêmes, la fin des choses et leur principes sont pour lui invinciblement cachés dans un secret impénétrable 3, également incapable de voir le néant d’où 4 il est tiré, et l’infini où 5 il est englouti.

Que fera-t-il donc, sinon 6 d’apercevoir [quelque] apparence du milieu des choses 7, dans un désespoir


terre dans une justesse admirable de proportions ; et qu’il n’y ait aucune des parties de ce grain qui ne contienne encore un monde proportionnel I Quelle peut être la partie dans ce petit monde, qui répond à la grosseur d’un grain de blé, et quelle effroyable différence doit-il y avoir, afin qu’on puisse dire véritablement que ce qu’est un grain de blé à l’égard du monde entier, cette partie l’est a l’égard d’un grain de blé ? Néanmoins cette partie, dont la petitesse nous est déjà incompréhensible, contient encore un autre monde proportionnel, et ainsi à l’infini, sans qu’on en puisse trouver aucune qui n’ait autant de parties proportionnelles que tout le monde, quelque étendue qu’on lui donne » (4 e part., ch. i).

i. [il aura pour la nature.]

3. [Du néant.]

3. [Que pourra-t-il donc concevoir ? sera-ce l’infini, lui qui est borné ? Sera-ce le néant ? il est un être, également.]

4. [Tout est tiré.]

5. [Tout est poussé.] (i. [D’entrevoir.]

7. [Sans espérance.]