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Ceux qui jugent d’un ouvrage sans règle sont, à l’égard des autres, comme ceux qui [Vjont [pas de] i montre à l’égard des autres. L’un dit : Il y a deux


sions et les paradoxes des Stoïciens, dans la philosophie autre chose que les syllogismes de la scolastique ou les théorèmes du cartésia nisme ; et cette autre chose c’est une intuition profonde et complexe de la réalité, le sentiment, le cœur. (Voir à ce sujet les fragments de la Section IV, en particulier de 274 à 283.) Méré a exprimé dans son Discours de la Conversation une distinction toute voisine : « Il y a deux sortes d’étude, l’une qui ne cherche que l’art et les règles, l’autre qui n’y songe point du tout, et qui n’a pour but que de rencontrer par instinct et sans réflexion, ce qui doit plaire en tous les sujets particu liers. S’il fallait se déclarer pour l’une des deux, ce serait à mon sens pour la dernière, et c’est surtout par ce que l’on fait par expérience ou par sentiment qu’on se connaît à ce qui sied le mieux. Mais l’autre n’est pas à négliger, pourvu qu’on se souvienne toujours que ce qui réussit vaut mieux que les règles » (I, 33). La Rochefoucauld écrit : « Le bon goût vient plus du jugement que de l’esprit (Max. 258). — On est quelquefois un sot avec de l’esprit, mais on ne l’est jamais avec du jugement. » (456) — Mais il écrit aussi (97) "• « On s’est trompé lorsqu’on a cru que l’esprit et le jugement étaient deux choses différentes : le jugement n’est que la grandeur de la lumière de l’esprit. »

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Cf. B., 33o ; G., 281 ; P. R., XXXI, 7 ; Bos., I, x, 5 ; Faug., I, a5 7 ; Hav., VII, 5 ; Mol., II, 137 ; Mich., 34a.

1. Le manuscrit porte : ont une montre ; mais il est clair que les deux parties de la phrase ne se correspondent plus. Nous suivons la correction proposée par Faugère ; celle de Havet : ceux qui jugent d’un ouvrage par règle ne convient pas tout à fait à la suite du frag ment. — Dans une note de la Revue d’histoire littéraire de la France, (année 1898, p. 339) ^^Delatouche et Arnould défendent le texte de Pascal en le rapprochant du fragment précédent ’.juger sans règles c’est juger par sentiment, et le sentiment équivaudrait à la montre. Mais cette interprétation subtile, qui est bien paradoxale en soi, n’est pas non plus très pascalienne : au fr. 274 Pascal réclame une règle pour le sentiment.