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qui n’ont qu’un cullc grossier et charnel, où tout est exté rieur, tout sentant l’homme, tout indigne de Dieu, et qui, le laissant dans la même ignorance de la nature de Dieu et de la sienne, ne font que lui apprendre de plus en plus jusqu’où peut aller l’extravagance des hommes. Enfin, plutôt que d’en choisir aucune, et d’y établir son repos, il prendrait le parti de se donner lui-même la mort, pour sortir tout d’un coup d’un état si misérable ; lorsque, près de tomber dans le désespoir, il découvre un certain peuple, qui d’abord attire son attention par quantité de circonstances merveilleuses et uniques.

C’est ce peuple juif dont M. Pascal fait remarquer tant de choses (qu’on trouvera pour la plupart dans le Recueil de ses Pensées) qu’il faut n’avoir guère de curiosité pour ne pas les approfondir. Ce sont des gens tous sortis d’un même homme, et qui ayant toujours eu un soin extraordinaire de ne point s’allier avec les autres Nations et de conserver leurs généalo gies, peuvent donner au monde, plutôt qu’aucun autre peuple, une histoire digne de créance, puisque enfin ce n’est propre ment que l’histoire d’une seule famille, qui ne peut être sujette à confusion ; mais pourtant d’une famille si nombreuse, que s’il s’était mêlé de l’imposture, il serait impossible, comme les hommes sont faits, que quelqu’un d’eux ne l’eût découverte et publiée ; outre que cette histoire étant la plus ancienne de toutes, elle n’a pu rien emprunter des autres» et que par cela seul elle mérite une vénération particulière.

Car, quoi qu’on puisse conter louchant les histoires de la Chine et quelques autres, le moindre discernement suffit nour voir que ce ne sont que des fables ridicules, et que celle-ci peut être véritable. Plus on examine celles-là, plus on en sent la fausseté : au lieu qu’à mesure qu’on approfondit celle-ci, elle se confirme elle-même et elle devient incontestable. Et enfin, quand il sera question de choisir entre des hommes tombés du soleil ou sortis d’une montagne, et des hommes créés par un Dieu tout-puissant, il faut se connaître bien peu à ce qui a l’air de vérité, pour balancer un moment.

Cet homme donc, ravi de cette découverte, et résolu de la pousser comme sa dernière ressource, trouve d’abord que ce peuple si considérable se gouverne par un livre unique, qui comprend tout ensemble son histoire, ses lois et sa religion ;