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esté pleinement persuadée qu'elle ^ourroit que deux heures avant sa mort; et cela fait mieux voir que ces bonnes dispositions estoient solides, et qu'elles ne nais- soient pas de cette crainte que donne un péril que l'on void présent. Car elle a toujours espéré d'en revenir: mais elle ne l'a point souhaité ; et particulièrement de- puis le dernier voyage de M. Singlin elle a eu plus d'envie que de crainte de la mort. La pauvre Enfant se trouvant fort mal le jour de la S te -Croix, alla communier comme en Viatique, avec un peu de crainte pour le succès d'un mal qui commençoit violemment, mais d'ailleurs bien disposée principalement en ce qu'elle avoit de la joie d'estre malade, regardant la maladie comme une pénitence, et sa plus grande crainte après celle de la mort, estoit de n'user pas bien de sa maladie et de ne souffrir pas assez patiemment. Dieu luy a fait la grâce dans la suite de luy oster entièrement la première, et tout le sujet qu'elle avoit de l'autre. Car elle a esté si douce et si bonne malade qu'elle a donné une édification générale à toutes celles qui l'ont servie. Et ce qui nous donne sujet de croire qu'elle ne le faisoit que par vertu, et que c'estoit plus un ouvrage de la grâce qu'un effet de l'abbattement de la nature, c'est que m'estant apperceue, il y eut lundy huit jours, qu'elle faisoit grande difficulté de prendre une tisanne à qui selon toutes les apparences l'on doit le reste de sa vie depuis ce jour là jusques à aujourd'huy, et qu'au lieu qu'elle beuvoitson eau ordinaire avec empressement pour se rafraichir, elle ne prenoit celle-cy que goutte à goutte, je luy dis doucement néanmoins que puis que Dieu luy avoit envoyé cette maladie comme une pénitence, elle devoit y

i. Une copie faite au xvn e siècle pour M lle de Théméricourt porte : mourait.

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