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LETTRE DE PASCAL A Mr ET A Mlle DE ROUANNEZ 407

J’envoye à ce dessein des prières qu’on m’a demandées ; c’est à trois heures apres midy 1. Il s’est fait un miracle depuis vostre depart à une Religieuse de Pontoise 2 qui sans sortir de son couvent a esté guerie d’un mal de teste extraordinaire par une devotion à la Sainte Epine. Je vous en manderay un jour davantage ; mais je vous diray sur cela un beau mot de saint Augustin, et bien consolatif pour de certaines personnes, c’est qu’il dit que ceux-là voyent veritablement les miracles ausquels les miracles profitent 3, car on ne les voit pas si on n’en profite pas.

Je vous ay une obligation que je ne puis assez vous dire du present que vous m’avez fait. Je ne sçavois ce que ce pouvoit estre ; car je l’ay deployé avant que de lire vostre lettre, et je me suis repenti ensuite de ne luy avoir pas rendu d’abord le respect que je luy devois. C’est une verité que le Saint-Esprit repose invisiblement dans les reliques de ceux qui sont morts dans la grace de Dieu, jusqu’à ce qu’il y paroisse visiblement en la resurrection et c’est ce qui rend les reliques des Saints si dignes de veneration. Car Dieu n’abandonne jamais les siens, et non pas mesme dans le sepulchre où leurs corps, quoy que morts aux yeux des hommes, sont plus vivans devant Dieu, à cause que le peché n’y

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1 . Il s’agit sans doute de l’antienne et de l’oraison chantées à Port-Royal devant la Sainte Épine ; Jacqueline Pascal en parle dans sa lettre du 29 mars i656, cf. supra T. IV, p. 330, n. 2.

2. Voir sur ce miracle, supra p. 403.

3. Nous n’avons pas retrouvé cette citation.