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DOUZIÈME PROVINCIALE. — INTRODUCTION 355

donné par l’imposition des mains des Apostres, leur offrit de l’argent, en disant : Donnez moy aussi cette puissance que tous ceux à qui j’imposeray les mains, reçoivent le Saint Esprit [p. 381]. Y a-t’il un seul mot en ces paroles ny de vente, ny d’achapt, ny d’égalité de prix ? et ce qui fait bien voir que ce Magicien n’avoit point intention d’achepter en la maniere grossiere que ce Jesuite dit estre essentiellement requise à la Simonie, c’est qu’il ne dit point aux Apostres, Je serois bien aise d’avoir la mesme puissance que vous avez de donner le Saint Esprit, combien la voulez vous vendre? quel est son juste prix ? Voila ce qu’il devoit faire, selon ce Jesuite pour estre justement accusé de Simonie; mais il les prie simplement de luy donner cette puissance, et leur presente de l’argent, ou comme un motif pour les induire à la luy donner, ou comme un present en forme de reconnoissance. De sorte que si saint Pierre eust estudié en l’Eschole des Jesuites, il se seroit bien gardé de condamner si severement une action qui n’estoit point mauvaise, selon les maximes de ce Professeur 1... [p. 381].

Mais voyons sur quels fondemens ce Jesuite establit cette conclusion, et qui sont les grands Docteurs qu’il pretend l’avoir enseignée avant luy. C’est ce qu’entr’autres, dit-il, Milhard enseigne, inter cæteros docet Milhardus de pœnit. c, 65. nu. 2. Que peut-on attendre que de pernicieux et de corrompu de la Theologie de ces personnes, qui prennent pour leurs principaux Autheurs et leurs guides, des Escrivains remplis d’erreurs et de maximes pernicieuses comme est ce Milhard, et qui les alleguent pour confirmer par leur autorité ces mesmes opinions detestables pour lesquelles ils ont esté censurez, comme l’a esté ce Milhard par la Sorbone pour cette mesme doctrine Simoniaque 2 ? [p. 380].

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1. L’auteur étudie aussi le cas de Giezi, que discutera Pascal.

2. Le livre de Milhard intitulé : La Grande Guide des Curez, Vicaires et Confesseurs par F. Pierre Milhard Prieur de Sainte Dode de l’Ordre de S. Benoist, avait été censuré par la faculté de théologie de Paris en novembre 1619.