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DISCOURS SUR LA CONDITION DES GRANDS 371

je VOUS prierois de me monstrer les qnalitez qui méritent mon estime, si vous le faisiez elle vous est acquise*, et je ne pourrois vous la refuser avec justice ; mais si vous ne le faisiez pas, vous seriez injuste de me la demander et assurément vous n'y réussiriez pas, fussiez-vous le plus grand Prince du monde.

��m. DISCOURS

Je vous veux faire connoistre, M. vostre condition véri- table, car c'est la chose du monde que les personnes de vostre sorte ignorent le plus. Qu'est-ce à vostre avis d'estre grand Seigneur ? C'est estre maistre de plusieurs objets de la concupiscence des hommes, et ainsi pouvoir satisfaire aux besoins et aux désirs de phisieurs. Ce sont ces besoins et ces désirs qui les attirent auprès de vous, et qui font qu'ils se soumettent à vous, sans cela ils ne vous regarderoient pas seulement ; mais ils espèrent par ces services et ces déférences qu'ils vous rendent, obtenir de vous quelque part de ces biens qu'ils désirent, et dont ils voyent que vous disposez.

Dieu est environné de gens pleins de charité, qui luy demandent les biens de la charité qui sont en sa puis- sance ; ainsi il est proprement le Roy de la charité.

Vous estes de mesme environné d'un petit nombre de personnes sur qui vous régnez en vostre manière. Ces gens sont pleins de concupiscence. Ils vous demandent les

��I. Cf Pensées, fr. 333, T. II, p. aSa : « N'avez-vous jamais veu des gens qui pour se plaindre du peu d'état que vous faites d'eux, vous étalent l'exemple des gens de condition qui les estiment ? Je leur repondrois en cela : Montrez-moy le mérite par où. vous avez charmé des personnes, et je vous estimeray de mesme. »

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