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332 ŒUVRES

��IX

��Ouy, Seigneur, jusques icy j'ay toujours esté sourd à vos inspirations : j'ay mesprisé Hous vos ora- cles ; j'ay jugé au contraire de ce que vous jugez ; j'ay contredit aux saintes maximes que vous avez apportées au monde du sein de vostre Père Eternel ; et suivant lesquelles vous jugerez le monde. Vous dites : Bienheureux sont ceux qui pleurent, et mal- heur à ceux qui sont consolez^ : et moy j'ay dit, malheureux ceux qui gémissent; et tres-heureux ceux qui sont consolez. J'ay dit: Heureux ceux qui jouissent d'une fortune avantageuse, d'une réputa- tion glorieuse, et d'une santé robuste. Et pourquoy les ay-je reputez heureux, sinon parce que tous ces avantages leur fournissoient une facilité tres-ample de jouir des créatures c'est-à-dire de vous offenser ? Ouy, Seigneur, je confesse que j'ay estimé la santé un bien ; non pas parce qu'elle est un moyen facile pour vous servir avec utilité, pour consommer plus de soins et de veilles à vostre service, et pour l'as- sistance du prochain : mais parce qu'à sa faveur je pouvois m'abandonner avec moins de retenue dans l'abondance des délices de la vie, et en mieux gous- ter les funestes plaisirs. Faites-moy la grâce, Sei- gneur, de reformer ma raison corrompue, et de con- former mes sentimens aux vostres : que je m'estime

I. A. tous, manque.

3. Luc, VI, 21-24 : Beati qui nunc flelis.... Vas vobis divitibus, quia habetis consolationcm vestram.

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