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INTRODUCTION LVII

la prière, n’accorde la prière qu’aux enfants de la promesse, jaloux qu’il est de se réserver la prééminence et la dignité de la causalité 1 .

Pour débarrasser de toute équivoque cette matière de la grâce, à laquelle il touchait dans les dernières Provinciales et qu’il traitait (peut-être en 1658), dans une série d’écrits spéciaux, pour rendre « plausible » et « populaire», selon son vœu 2 , la doctrine augustinienne, Pascal devait donc exposer sa conception originale du rôle de la raison.

La raison prend acte des doctrines adverses qui se détruisent par leur contradiction mutuelle; elle s’élève vers le plan supérieur de vérité où apparaît la nécessité même de la contradiction 3 . Cette logique nouvelle, Pascal déjà l’avait aperçue au temps où l’interprétation directe de ses expériences se heurtait aux résistances des métaphysiciens scolastiques ; il l’appliquait devant M. de Saci à l’opposition d’Epictète et de Montaigne ; l’ Apologie pour le Christianisme avait pour objet d’en dévoiler toute la profondeur et toute la généralité, de tirer des obscurités de l’histoire, des ambiguïtés des prophéties, des miracles, la lumière intérieure par laquelle les âmes sont éclairées et définitivement entraînées vers Dieu. C’est pourquoi, si les circonstances ont conduit l’auteur des Provinciales à continuer la lutte par la Lettre d’un Avocat au Parlement, et par les Ecrits des Curés, il faut voir leur véritable suite dans l’œuvre où Pascal s’efforçait de faire entendre le christianisme à ceux qui l’attaquent du dehors, ou du dedans le méconnaissent.

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1. Cf. Pensées, fr. 513, T. II, p. 410.

2. Voir à cet égard le témoignage de Nicole, infra T. XI, p. 100-101

3. Voir en particulier T. II, p. 210; T. VII, p. 361 ; T. XI, p. 139 ; T. XIV (Pensées T. III), p. 303.