Page:Œuvres de Blaise Pascal, IV.djvu/371

Cette page n’a pas encore été corrigée

QUATRIÈME PROVINCIALE 259

1 Dieu ne donne point la vertu, et qu’il ne s’est jamais trouvé personne qui la luy ait demandée, pensassent à la luy demander eux-mesmes ?

Qui pourra croire que les Epicuriens qui nioient la providence Divine eussent des mouvemens de prier Dieu? eux qui disoient que c’estoit luy faire injure de l’implorer dans nos besoins, comme s’il eust esté capable de s’amuser à penser à nous.

Et enfin comment s’imaginer que les Idolatres et les Athées ayent dans toutes les tentations qui les portent au peché, c’est à dire une infinité de fois en leur vie, le desir de prier le 2 veritable Dieu qu’ils ignorent, de leur donner les 3 veritables vertus qu’ils ne connoissent pas ?

Oüy, dit le bon Pere, d’un ton resolu, nous le dirons, et plûtost que de dire qu’on peche sans avoir la veuë que l’on fait mal, et le desir de la vertu contraire, nous soutiendrons que tout le monde, et les Impies et les Infideles ont ces inspirations et ces desirs à chaque tentation. Car vous ne sçauriez me monstrer,au moins par l’Escriture,que cela ne soit pas.

Je pris la parole à ce discours, pour luy dire : Et quoy, mon Pere, faut-il recourir à l’Escriture pour monstrer une chose si claire? Ce n’est pas icy un point de foy, ny mesme de raisonnement. C’est une chose de fait. Nous le voyons, nous le sçavons, nous le sentons.

_____________________________________________________________

1. B. [ce n’est pas] Dieu [qui] donne.

2. B. [vray].

3. B. [vrayes].