Page:Œuvres de Blaise Pascal, IV.djvu/243

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vous, par exemple, qu’un homme ait la nuit, et sans aucune lumière, le pouvoir prochain de voir. Ouy dea, il l’auroit selon nous, s’il n’est pas aveugle : Je le veux bien, leur dis-je ; mais Monsieur le Moine l’entend d’une maniere contraire. Il est vray, me dirent-ils, mais nous l’entendons ainsi. J’y consens, leur dis-je. Car je ne dispute jamais du nom, pourveu qu’on m’avertisse du sens qu’on luy donne. Mais je voy par là que quand vous dites que les justes ont tousjours le pouvoir prochain pour prier Dieu, vous entendez qu’ils ont besoin d’un autre secours pour prier, sans quoy ils ne prieront jamais. Voila qui va bien, me respondirent mes Peres, en m’embrassant, voila qui va bien. Car il leur faut de plus une grace efficace qui n’est pas donnée à tous,[1]et qui determine leur volonté à prier. Et c’est une heresie de nier la necessité de cette grace efficace pour prier.


An homini luce carenti proximam videndi potestatem concedetis ? Ita prorsus, inquiunt, nisi sit cæcus. Atqui, inquam, Doctori Moynio potestas proxima longè aliud sonat. Sic est, inquiunt : at nobis, id quod diximus sonat. Facile patior, inquam ; nam de verbis litigare non placet, dum ne quis in sensu me velit errare. Verùm, ut video, cùm justis proximam orandi potestatem’inesse dicitis, id sentitis : aliam præterèa gratiam opus esse, sine quâ nunquam orabunt. Hîc unus amanter me complexus : Bellissimè, inquit, bellissimè ; est enim insuper necessaria efficax gratia non omnibus concessa, quæ voluntatem ad agendum indeclinabiliter impellat. Nam illius efïicacis gratiæ necessitatem ad orandum negare, certissima hæresis est.

  1. P. et, manque.