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II

LETTRE DE LA SŒUR

JACQUELINE DE SAINTE-EUPHEMIE PASCAL

A MADAME PERIER, SA SŒUR.

Gloire à Jesus au Tres-saint Sacrement.

A P. R., ce 25. Avril 1655.

Ma tres-chere sœur,

Je prens une grande feuille par ce que je suis en devotion de vous faire une grande lettre, si Dieu m’en fait la grace. Apres avoir lu vostre lettre que mon frere m’apporta, je ne pensois point du tout y repondre ; premierement, par ce que je me trouvois tres-esloignée de le pouvoir ; et outre cela je ne croyois point du tout le devoir, par ce qu’il me semble qu’il n’y a rien de plus sauvage que de voir une petite novice, qui à peine commence d’ouvrir les yeux à la vraye lumiere, vouloir se mesler d’eclairer les autres et de porter le flambeau devant eux : cela me semble insupportable. Neantmoins, voyant que je ne pouvois procurer d’ailleurs le secours que vous me demandiez, par ce que l’humilité de nos Meres et la maladie de M. Singlin m’en ostoient tout moyen, j’ay cru que m’estant trouvée autrefois dans la peine où je vous vois, je pourrois vous dire avec liberté les choses que je me suis dites à moy-mesme, puisque comme je le pretens nous ne sommes qu’un cœur et une ame en Jesus-Christ.

Comme j’en estois là, il m’est venu en pensée que