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qu'il ne faut point se flatter, et que c'est pour soy mesme et pour son propre interrest qu'on se fasche.

« Oubliez donc tout ce qui s'est passé, et usez envers vos parens, comme je vous ay dit, je vous en prie ; parlez leur et leur escrivez comme si rien ne s'estoit passé, sinon que vous confirmerez la démission que vous avez faite ; mais souvenez vous qu'en tout cela vous devez escrire et parler sincèrement, en évitant d'un costé de le faire par orgueil et par courage, en disant : nous aurons plus de générosité que vous ; car il ne faut pas que ce soit par ce principe que nous le faisons, cela ne vaudroit rien du tout, il faut que ce soit la charité qui nous y oblige ; et de l'autre, il faut bien se garder de le faire pour les pi- quer d'amitié, et les obliger par là à faire ce que vous voulez ; car ce seroit reprendre d'un costé ce que vous lais- sez de l'autre. Mais il faut que ce soit le seul désir de les mettre tous en paix, et surtout vostre parente, que vous sçavez qui est fort tendre, et qui seroit si touchée si elle pensoit que vous fussiez faschée contre elle, que cela seroit capable de redoubler dangereusement l'indisposition où elle est à présent ^ » .

Je vous raconte^ toutes ces petites choses, ma chère Mère, peut estre avec plus de liberté que de raison ; mais c'est qu'il me semble que tout le monde doit estre aussy touché que moy de voir ce soin et cette charité de nos- tre chère Mère, et comme, lorsque cette divine vertu est

��1. Voir plus bas, p. 97.

2. « Tout ce petit particulier, ma chère Mère, peut estre avec plus de liberté que de raison, et mesme contre la civilité qui ne veut pas qu'on importune les autres de ce qui ne touche que nous, et moins encore des personnes à qui l'on doit beaucoup de respect ; mais je n'ay point creu que cette maxime eust lieu icy, parce qu'il me sem- ble que chacun doit estre aussy touchéque moy... »

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