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76 ŒUVRES

devant Dieu que celle de tous les biens de la terre, quelque usage qu'on en peust faire. Dieu ne considère point tout cela. Il n'a que faire de nos biens, il les estime comme rien en comparaison des vertus qu'il met en nous. C'est là les biens véritables, et il faut souvent s'examiner sur l'usage qu'on en fait pour son profit particulier et pour celuy des autres. Cependant on ne songe point à cela ; on n'est que peu ou point touché quand on vient à decheoir de son humilité accoustumée, de sa douceur ou de quel- que autre vertu ; et on entre en scrupule d'avoir mal employé un peu d'argent, qui est le moindre de tous les biens que Dieu nous commet et qui ne peut tout au plus servir qu'à soulager quelque misère tempo- relle ou à quelque autre œuvre qui passera avec le temps, au lieu que les grâces et les vertus sont des trésors qui doivent servir éternellement à sa propre ame et à celle des autres, si on a soin d'en faire usage et de ne pas les laisser perdre. Et puis, enfin, c'est une chose faite ; vous n'avez plus à y pensera Songez seulement à bien rendre grâce à Dieu de vous avoir donné la connoissance de cette Maison, et l'estime que vous en avez conceuë, qui vous l'a faite préférer à toutes les autres ; car sans cela vous auriez sans doute esté dans une de celles qui sont en vogue à présent et dans une si grande réputation de sainteté, et avec raison ; car il est vray que ce sont des filles aussy saintes qu'on le sçauroit désirer, dans les austeritez pro- digieuses et dans une si exacte observance de toute leur règle qu'elles n'y voudroient pas avoir manqué d'un

��I . « Je dis que c'est une tentation pour vous qui vous détourne de ce que vous avez à faire ; ne songez donc plus à tout cela, pensez seu' lement à rendre grâces à Dieu de ce qu'après vous avoir fait la miscv ricorde de vous donner la pensée de sortir du monde, il vous a donné la connoissance... »

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