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12 ŒUVRES

que je sois libre et qu'il ait plu àDieu qui chastie en favori- sant et dont les chastiments sont des faveurs, de lever en la manière que vous sçavez^ et que je n'ose nommer pour ne mesler rien de triste parmi ma joye, le seul obstacle légi- time qui pouvoit s'opposer à l'engagement où je désire d'entrer, je ne laisse pas d'avoir besoin de votre consente- ment et de votre aveu, que je demande de toute l'affection de mon cœur, non pas pour pouvoir accomplir la chose, puis qu'ils n'y sont point nécessaires, mais pour pouvoir l'accomplir avec joye, avec repos d'esprit, avec tranquil- lité, puisqu'ils sont nécessaires absolument, etque sans cela jeferay la plus grande, la plus glorieuse et la plus heureuse action de ma vie avec une joye extrême meslée d'une extrême douleur, et dans une agitation d'esprit si indigne d'une telle grâce que je ne croy pas que vous soyiez si insensible pour vous pouvoir résoudre à me causer un si grand mal. C'est pour quoy je m'adresse à vous, comme au maistre en quelque façon de ce qui me doit arriver, pour vous dire : Ne m'ostez pas ce que vous n'estes pas capable de me donner. Car encore que Dieu se soit servy de vous pour me procurer le progrez des premiers mouvements de sa grâce, vous savez assez que c'est de luy seul que procède tout l'amour et toute la joye que nous avons pour le bien , et qu'ainsy vous estes bien capable de troubler la mienne, mais non pas de me la redonner si une fois je viens à la perdre par vostre faute. Vous devez connoistre et sentir en quel- que façon ma tendresse par la vostre, et juger que si je suis assez forte pour ne laisser pas de passer outre mal- gré vous, je ne la suis pas assez peut estre pour estre à l'es- preuve de la douleur que j'en recevray. Ne me réduisez

X. « La mort de M. Pascal, leur père ». Note du P. Guerrier.

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